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Khelios - Khelios, jour 13



Khelios, jour 13

Le calme après la tempête.

Comme l’a expliqué Nicolas dans son dernier post, les derniers jours ont été beaucoup plus durs en terme de météo, les grains se sont multipliés jusqu’à constituer un ensemble orageux complet… Le vent s’arrête puis s’accélère avec des bourrasques au delà de 30 noeuds, il change de sens régulièrement et parfois jusqu’à un sens opposé, la pluie va du crachin à des pluies fortes très denses et brutales… Le tout dans une mer déchaînée mais sans houle (aplatie par la pluie). Il devient donc très dur de manier le bateau, le moral en prend un coup, on se retrouve cloîtrés le plus souvent à l’intérieur, ballottés comme dans une machine à laver… le bateau gitant d’un côté à l’autre, parfois fortement, et claquant parfois sur la mer en faisant de gros plat à l’avant en retombant de grosses vagues. À l’extérieur, ceux en quart se retrouvent dans la pénombre complète le plus souvent, trempés par la pluie, les mains accrochées à la barre avec énergie pour contrebalancer les impulsions des coups de vent et des vagues. En fin de quart, les mains deviennent gonflées et calleuses, vraiment pas belles à voir !
La deuxième nuit, les éclairs et le tonnerre sont encore plus importants, donnant un côté spectaculaire, apportant profondeur et beauté dans une pénombre angoissante.
A l’intérieur, on se sent toujours à l’intérieur d’une machine à laver… avec une belle symphonie:
PAM le bateau qui tombe à plat d’une vague, CRIEEEEC le bruit du mât qui se tord, SPLASH la vague qui tombe sur la cabine, HIIIIAN les parois du bateau qui crissent en bougeant, SCHHHH GLING, le cageot de vaisselle qui glisse et se recale, SCHHHH le bruit des vagues léchant vigoureusement les bords du bateau laissant les hublots d’une vue sous marine à une vue zénithale du ciel, BIP la sonnerie de notre électronique annonçant un changement de vent ou une faiblesse de batterie, MIIIIP l’alarme incendie suite aux vapeurs de cuisine (car on n’a pas diminué l’ambition culinaire), AIEHHHH le collègue qui se cogne suite à un mouvement de bateau mal appréhendé, PANG le bruit de la baume suite à une vague ou un changement brutal de vent, TCCCCCHHHHIIIIICC la pluie qui bat sur le pont, RRRFFFFFF la bourrasque de vent…

Cette période de grosses pluies est aussi le temps des douches sous la pluie sur le pont pour économiser l’eau… C’est également le temps de franches rigolades comme cet incident qui s’est produit au cours du dîner de galettes complètes maintenu malgré les éléments, et alors que nous somme cloîtrés à l’intérieur à essayer d’amortir la forte gîte et les mouvement irréguliers et brutaux du bateau ; suite à une vague plus forte l’un des nôtres perd l’équilibre pour se retrouver assis sur les genoux d’un autre… s’en suit un sourire malicieux de l’heureuse victime qui pense avoir finalement trouvé un bon siège… sourire de courte durée car on le voit vite se relever grimaçant en se massant les fesses où était restée collée… la galette brûlante qui était posée juste avant dans l’assiette sur les genoux de la personne sur laquelle il s’est assis! Ceci déclenche une énorme crise de fou rire… et le retour de notre skipper qui était parti régler les voiles sur le pont et qui nous rappelle surtout de faire plus attention pour éviter tout accident, que ceci aurait pu être plus grave, et qu’encore plus dans ces moments déjà complexes, il ne fallait pas rajouter d’accident à gérer, et donc être très vigilant pour ne pas tomber, ni être blessé par un équipement mal fixé comme un couteau ou de la vaisselle… il est vrai que nous apprendrons le lendemain que sur un bateau concurrent, un équipier est mal tombé suite à une forte vague et s’est ouvert fortement la joue à un point que le skipper a dû lui raccommoder la joue avec 6 agrafes! Les récits de blessure médiatisés par le Vendée Globe ressurgissent et nous rappelle que nous ne sommes décidément pas dans une aventure ordinaire. Ce qui n’empêchera toutefois pas un peu après au saladier plein de s’envoler des mains de celui qui le tenait… Et de se renverser partout avec la vinaigrette ce qui allait rendre le sol encore plus glissant !
Au-delà des problématiques de sécurité pour le bateau et pour nous, arrivent aussi les questios sur le retard que nous allons prendre (avec le vent changeant, nous ne pouvions tenir les caps choisis et nous devions en plus assumer des périodes sans vent ni vitesse - ceci n’empêchant pas la pluie et autres éléments contre nous de ralentir, eux) avec une arrivée à décaler de 2 jours probablement et les problèmes d’avion et d’agenda de reprise à décaler…
Mais nous gardons le moral et maintenons des moments conviviaux positifs comme la célébration au champagne du passage au 1000 miles restants! (En fait, on cherche un peu toutes les occasions à fêter, en choisissant tantôt les comparatifs au départ ou à l’arrivée!); Ou encore la diffusion de bonne musique dans les baffles exterieures du pont pour relancer l’enthousiasme

Pendant près de 48 heures, il sera difficile d’avancer, jusqu’à ce qu’on prenne la décision de partir en forçant le passage vers le sud pour essayer de sortir de cette zone orageuse, ce qui semble réussi ce 4 décembre matin.
Oh joie au réveil quand nous découvrons l’horizon qui se dégage doucement et les conditions s’améliorer!

Cette journée du 4 décembre sera inondée de soleil et de moral joyeux et optimiste. Vent favorable, ciel sans nuage. Reprise des activités de lecture, contemplation, douche en plein air, apéro et repas - en plus de la barre!
SCHHHHLELELELELE ça glisse sereinement, MMMMH la joie revient dans les cœurs.

Le skipper continue comme chaque jour ses contrôles minutieux des équipements et stocks, pomper l’eau qui apparaît dans les cales, vérifier l’état du,mât ou du moteur par exemple, mille petits points rigoureusement suivis comme je ne l’aurai pas imaginé. De même la tenue du bateau, rangement et propreté, nécessite une rigueur quotidienne.

On voit toujours peu de choses à regarder sur ce grand océan, un cargo hier et un voilier ce jour (ces petits événements deviennent pour nous des grands, on sort juste pour les constater même de loin…) ; quelques poissons volants dont un magnifique restera sur le pont et permettra de l’étudier - d’un bleu magnifique, longiligne avec de tes belles ailes bleutées également, beaucoup plus beau que les derniers, il fait penser aux créatures du film Avatar… rien d’autre; les ciels nuageux avec un fond clair me font penser aux ciels d’hiver du Berry ou à des peintures de ciels hivernaux d’Angleterre… les levers et couchers de soleil restent dans des tonalités assez semblables sur des pastels doux (sans jamais retrouver les couleurs extraordinaires que nous avons eu le premier soir de croisière en quittant Las Palmas), nous continuons d’avancer sur cet océan immense, uniforme, sans rien qui ne flotte dessus, assez vide.

Le rythme des quarts est bien pris, le sommeil concentré sur quelques séquences récupératrices, les repas rythmant la journée avec les quarts à la barre.
On trouve le temps d’apprécier ce rythme différent régulier, déconnecté de nos anciennes activités et réflexes. Pas d’attente de sonnerie de portable ni de recherche de nouveaux mails, pas de sujets d’occupation denses ni de stress venant occuper l’esprit. Finalement cela aura été plus simple de revenir à cet état serein où la journée passe agréablement sans être remplie - profitons en.

Hugues, pour l’équipage de Khelios


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